Chronique 14

Ce serait un mensonge de vous dire que vous conter ces mésaventures n’éveillent pas en moi une tornade d’émotion. Je tiens à m’excuser de transformer cette gazette en ramassis de sentiments, mais je pense que la transparence laisse place à l’humain véritable, valeur primordiale de ce journal.

Je reprends donc mon récit.

Le silence nous a enveloppé. Gwenaëlle et moi. Dans ses bras douillets. J’ai toujours aimé le silence. Dès petit, celui-ci était mon allié de création. Cette machine fumante qu’est mon cerveau ne pouvait fonctionner qu’à la condition que mon ami silence en titille les rouages.

Ce calme olympien, cette absence de vie aux alentours. Tout comme une longue inspiration du paysage qui m’entourait. Il y avait moi, mon ami silence, mon bureau et ma plume. Quels bons moments… Je crois m’égarer chers lecteurs, veuillez m’excuser. Mais je crois que me réfugier dans ces draps de souvenirs me fait le plus grand bien. Je reprends.

Les articulations déformées par le sol, nous étions là, immobiles, protégés par mon ami à la chaleureuse étreinte. Enfin, si je dois être honnête, je ne pense pas que ma demoiselle et moi soyons très réceptifs au cadeau que nous faisait mon ami. Le sang glacé, la vision brouillée et la respiration encore haletante, une alarme pourrait hurler que nous ne l’entendrions pas. Silence n’était d’aucune utilité, nous l’avions totalement mis à l’écart pour laisser libre court à la terreur présente dans chacune de nos respirations.

Monsieur Silence fut écarté quand ma partenaire prononça mon prénom (de sa douce voix mielleuse).

• Louis… Est-ce que tout va bien ?

Au-delà de la honte qui s’emparât de moi de ne pas être l’auteur de cette question, mon cœur se réchauffa un peu.

• Oui, tout va bien… Et toi ? Vous ?

Loin de moi l’idée de la vieillir avec ce pronom pluriel, mais la grammaire n’avait pas eu le temps de reprendre possession de mon vocabulaire.

• Ça va… Nous devons… Nous devons y aller. Maintenant.

Les gestes suivirent. Nos deux corps se mirent en mouvement. La jolie brune se leva, et d’un geste déterminé arracha la griffe monstrueuse de la porte. Je lui portai un regard interloqué. L’image de cette fleur délicate en possession d’un artéfact terrifiant était une vision quelque peu… Perturbante.

• Il faut que l’on amène ça au laboratoire. De suite.

Retrouver son ton autoritaire et plein d’assurance me rassura en quelque sorte. L’aplomb de cette femme. Je n’avais jamais rien vu de tel.

Je vous laisse sur ces quelques lignes chers lecteurs, emplis d’impatience de vous conter la suite.